Pour la première fois cette année, Art Basel inaugure un ambitieux programme de récompenses destiné à reconnaître les figures qui façonnent activement le paysage artistique contemporain. Lors de l’annonce officielle faite la semaine dernière, 36 lauréat·e·s ont été dévoilé·e·s. Réparti·e·s en neuf catégories, ces personnalités couvrent un large éventail allant des artistes aux commissaires d’exposition, des professionnel·le·s des médias aux représentant·e·s institutionnel·le·s, sans oublier les créatif·ve·s pluridisciplinaires et les figures de l’ombre. Noah Horowitz, président du conseil d’administration d’Art Basel, a déclaré que ces prix ont été pensés pour « rendre visibles les acteurs qui bâtissent collectivement la mémoire et l’avenir du monde de l’art ».
Neuf catégories, trente-six figures

Les Prix Art Basel 2025 reconnaissent non seulement les réalisations individuelles mais aussi la complexité des mécanismes globaux de production, de soutien et de diffusion de l’art. Le programme est structuré autour de neuf catégories représentant les divers rôles essentiels à l’écosystème artistique : Artistes Émergent·e·s, Artistes Établi·e·s, Artistes Iconiques, Créatif·ve·s Pluridisciplinaires, Commissaires, Musées & Institutions, Mécènes, Allié·e·s et Médias & Narrateur·rice·s.
Les 36 médailles de 2025 rassemblent des figures de plusieurs continents et disciplines. Dans la catégorie Artiste Iconique, Adrian Piper revient sur le devant de la scène avec une œuvre conceptuelle interrogeant les rapports entre race, identité et pouvoir ; Betye Saar ravive la mémoire du mouvement Black Arts avec des pièces comme The Liberation of Aunt Jemima. Cecilia Vicuña est, quant à elle, honorée pour ses installations mêlant poésie, écologie et féminisme.

Dans la catégorie Artistes Établi·e·s, Ibrahim Mahama recouvre des bâtiments publics de sacs ayant circulé sur les anciennes routes commerciales coloniales, tissant ainsi une trame historique tangible. De son côté, Cao Fei transforme nos expériences numériques en mémoire artistique à travers ses univers d’avatars virtuels.
Parmi les Artistes Émergent·e·s, Meriem Bennani se distingue avec des vidéos courtes teintées de satire postcoloniale, tandis que Pan Daijing développe une narration hybride mêlant son, performance et chorégraphie.

Dans la catégorie Créatif·ve·s Pluridisciplinaires, Formafantasma interroge les cycles de production et de consommation à travers des recherches critiques sur les déchets électroniques. Grace Wales Bonner explore les récits de la diaspora caribéenne à travers des collections entre littérature, musique et mode.
Certaines catégories valorisent également les efforts souvent invisibles. Le collectif Art Handlxrs*, centré sur les technicien·ne·s queer et migrant·e·s, met en lumière les coulisses de la production artistique. Des réseaux comme Gasworks / Triangle Network favorisent la mobilité des artistes, tandis que des voix médiatiques comme Negar Azimi, Barbara Casavecchia ou The Journal of Curatorial Studies enrichissent le discours critique et académique.
Côté institutions, le Jameel Arts Centre de Dubaï souligne le rayonnement de l’art contemporain au Moyen-Orient, tandis que la RAW Material Company de Dakar propose un modèle pédagogique alternatif en Afrique. En commissariat, des personnalités comme Candice Hopkins, Eungie Joo et Shanay Jhaveri introduisent des lectures politiques et historiques dans leurs projets curatoriaux.
Une sélection de confiance, portée par des voix internationales
Les médailles de cette première phase ont été attribuées par un jury international composé de figures majeures du monde de l’art. Présidé sans droit de vote par Vincenzo de Bellis, directeur des foires et des plateformes d’exposition d’Art Basel, le jury rassemblait Hoor Al Qasimi (Sharjah Art Foundation), Elena Filipovic (Kunstmuseum Basel), Jessica Morgan (Dia Art Foundation), Hans Ulrich Obrist (Serpentine Galleries), Adriano Pedrosa (MASP), Suhanya Raffel (M+, Hong Kong), Franklin Sirmans (PAMM) et Philip Tinari (UCCA, Pékin). Un hommage a été rendu à Koyo Kouoh (Zeitz MOCAA), membre du jury récemment disparue, pour sa contribution essentielle.
La sélection s’est articulée en trois étapes : une présélection de candidat·e·s recommandés par des observateur·rice·s à travers le monde, une évaluation par le jury, puis la nomination des 36 lauréat·e·s dans neuf catégories.
Une reconnaissance fondée sur l’élection par les pair·e·s
Les Prix Art Basel introduisent un modèle inédit fondé sur l’évaluation entre pair·e·s. À la fin de l’année, les 36 lauréat·e·s choisiront parmi eux·elles douze personnalités qui recevront une médaille d’or, sans intervention d’un jury externe.
Cette reconnaissance s’accompagne d’un soutien financier conséquent. Les artistes sélectionné·e·s dans les catégories concernées recevront chacun·e une subvention inconditionnelle de 50 000 USD. Une commande publique sera attribuée à un·e artiste établi·e pour Art Basel 2026 à Bâle, tandis que les Artistes Iconiques désigneront une organisation bénéficiaire. Les institutions, allié·e·s et médias bénéficieront, eux aussi, d’opportunités de développement professionnel et de coopération internationale.
Une chronologie qui rythme l’année artistique
Lancée officiellement le 15 mai 2025, la trajectoire des prix s’inscrit dans une série d’événements structurants. En juin, les lauréat·e·s se réuniront lors de la foire principale à Bâle. Le 19 juin, une réception au Kunstmuseum Basel marquera la première rencontre publique avec les lauréat·e·s, suivie d’un sommet intitulé Art Basel Awards Summit, réunissant artistes, responsables de musées, commissaires, éditeur·rice·s et penseur·euse·s pour débattre du présent et du futur de l’art contemporain.
Le cycle se conclura à Art Basel Miami Beach, le 4 décembre 2025, avec l’annonce publique des 12 médailles d’or désigné·e·s par les lauréat·e·s eux·elles-mêmes.